Que peut bien encore signifier la mer pour nos yeux « modernes » ? Cette mer sillonnée de navires de plus en plus gros, efficaces et rentables ou de plus en plus spectaculaires, à bord desquels le navigateur n’est solitaire que pour mieux multiplier le nombre de ses adorateurs et augmenter le spectacle. Sous le vernis, exorbitant, de la mer spectacle les valeurs puissantes dont l’humanité, de tout temps, a su nourrir son imaginaire sont-elles parvenues à demeurer ?
L’eau, dans son extension terrestre, est, sous nos yeux, la perfection même en matière d’ambivalence. Terre et eau, en un dialogue constant, nous offrent l’horizontalité des surfaces. Mer et ciel nous offrent la verticalité des mouvances que nous interdit la terre. La terre nous offre le repli intime du creux mérité, fouillé, excavé de la maison dure et douce, ni sèche ni moite, où fines gouttelettes, l’eau sait se faire petite, comme le vent sait se faire souffle léger, haleine pour la vie. De trois des « quatre éléments » naît la complétude. Le feu n’en est pas. Elémentaire : le feu, en fait, quoi qu’on dise, n’est pas un élément, c’est un état. A eux trois ils assurent la clôture bienheureuse d’une béance qui menace toujours l’heureuse intimité. . .
A force de faire commerce de tout, l’objet n’a plus d’importance. C’est le spectacle de la vente qui compte. Spectacle, vitrine et mise en scène de la convoitise. Dire vaut plus que « valoir ». Convoiter vaut mieux que posséder. De la lutte que se livrent depuis déjà de nombreuses décennies argent et autorité politique c’est l’imaginaire de la marchandise, autrement dît le paraître et son négoce : le « spectacle » qui sont sortis vainqueurs. Trouvez donc ce qui, autour de nous n’est pas sous une forme ou une autre parfaitement marchandisable!
Faut-il avoir été sourd et aveugle pour ne pas en avoir perçu la marque toujours aussi forte à travers les dernières décennies … celles qui s’auto-proclamaient « laïques » ou « païennes » ou « libérées » alors qu’elles s’ancraient plus profondément encore dans une métaphysique brute de décoffrage. En vrac : nationalismes, utopies matérialistes ou autres, flower children ou New Age. En quoi le religieux serait-il en train de RE- venir ?
Ne faut-il pas s’indigner devant cette déferlante d’indignations ? Chacun sait comment la dite mode est advenue. Mais trop c’est trop : au point de perdre toute crédibilité et de « tolèrer » tout et n’importe quoi en parfaite bonne conscience, de perpétrer et perpétuer les mêmes injustices dans une civilisation où, c’est indéniable, flagrant même, les inégalités profitent au plus grand nombre.
Excès de vie, excès de mort : frappés par la fougue. L’excès de vie est orienté vers un seul but : la mort. Inversement, l’excès de mort, goût de la destruction ou de l’auto-destruction est entièrement tourné vers la survie, voire même vers un goût immodéré de la vie. L’excès conduit, c’est bien connu, à son contraire. La mesure, elle, conduit à l’accomplissement du même par le même… ainsi va le monde…
Le cancre se comporte comme un crabe, il va de travers et se dirige vers là où il ne regarde pas. Il rayonne, cancer, s’étale, s’étoile comme le vers latin ou le palindrome. Car cancer, cacrinus, cancrum sont tout un.
La gangrène aussi y puise sa source, étoilement néfaste qui gagne et fait aller de guingois.
Les cancres sont séduisants toujours, ils vont de travers, ils ont une mauvaise influence, ça les rend bien entendu irresistibles.
Le cancre fascine.
L’identité est toujours affaire de représentations. L’identité européenne, si tant est qu’une telle chose existe, ne fait pas exception. Ainsi l’Europe en sa diversité est un lieu d’éternel changement, un lieu au dynamisme acharné qui se démarque des cultures « statiques » et devient cet Occident qui s’étend désormais hors d’Europe :
Occident à la « haute technicité » mais …qui n’est que l’autre nom d’une « science sans conscience… » (« …n’est que ruine de l’âme. » – Rabelais). L’Europe peut-elle encore lui redonner une âme, à cet Occident technicien ?
Le pouvoir, la politique et le monde de l’art ont tout au long de l’histoire connu de nombreuses convergences à défaut d’une longue histoire d’amour. Ce n’est que récemment (fin du XXème siècle) que la confusion organisée de main de maître est parvenue à gommer les frontières non seulement entre les avenues et les goûts du pouvoir mais aussi entre l’art et ce qui n’en est pas – ce dans quoi il faut inscrire la « marchandise ».
Comment miser ? Présent ou patrimoine ? C’est tout un programme de travail qui semble s’imposer à notre génération quand on constate l’opposition des deux clans qui s’affrontent tant dans la presse spécialisée que dans les couloirs des ministères : les adorateurs du patrimoine (sur l’air de « ah c’était le bon temps mais tout fout le camp ») et les adulateurs d’un présent hyper-post-moderniste porteur des lendemains qui chantent (sur l’air de « miroir mon beau miroir, nous n’avons jamais été aussi beaux et intelligents »).
On sait ce que l’on peut faire dire au passé. On l’a vu être mis au service d’innombrables enjeux contemporains, des plus futiles ou frivoles aux plus sérieux ou rentables, des plus innocents aux plus machiavéliques (manipulations identitaires, tribales, claniques, indépendantistes, universalistes, populistes… ). L’industrie des legs du passé ou celle de son dénigrement est vite devenue une nouvelle filière économique. Une chose est sûre, cependant, elle n’aura jamais les moyens de l’innocence dont elle entend se parer.
La petite voiture est une peau. La grande voiture est un lieu privé. La petite voiture est une clôture utérine, infantile, ou familière. La petite voiture est, en fait, de l’ordre du même, du moi-même et épouse vos contours.La grosse, je devrais dire la « grande » voiture, celle qui est dite « bourgeoise » ou « arrivé ». est plus objectale et moins viscérale, donc plus étrange à mon corps.
… de quoi l’Europe est-elle le NON ? « Rapprocher les institutions européennes des citoyens » et offrir à ceux-ci « un meilleur contrôle démocratique » telle était l’ambition de la Déclaration de Laeken (décembre 2001) qui traçait la voie que devrait suivre la Convention pilotée par M. Giscard d’Estaing.
Comment résonnent ces mots aujourd’hui que l’on vu avec quel dépit, quelle morgue parfois, quelle colère souvent, les élites gouvernantes ont accueilli le vote désobéissant des Hollandais, des Français et plus récemment des Irlandais (coupables en plus de n’avoir pas salué le léger façonnage du texte effectué à Lisbonne).
Il n’y a pas d’hypothèse de succès pour l’Europe aujourd’hui. Aucun vote n’y a plus le moindre sens. L’insulte parlementaire à la française piétinant le choix de 55% des électeurs n’y a rien changé.
Pourquoi transformer un hasard de fait en hasard de fabrication ? Pourquoi penser apprivoiser le hasard en tentant de se le représenter par des jeux qui sont comme dépourvus de conséquences?
L’enseignement du jeu est important, on n’y pense plus aujourd’hui que nombre de parents gagnent leur vie en perdant le temps qu’ils doivent à leurs enfants.
Il y a le jeu qu’on invente et le jeu qu’on apprend. Tout est là . Tout vient de là .
Apprendre à jouer c’est s’apprendre à jouer. L’enseignement s’accroche, s’enclenche sur cette [...]