Faut-il avoir été sourd et aveugle pour ne pas en avoir perçu la marque toujours aussi forte à travers les dernières décennies … celles qui s’auto-proclamaient « laïques » ou « païennes » ou « libérées » quand ce n’était pas « frivoles » (avec un pudique frisson d’émotion) alors qu’elles s’ancraient plus profondément encore que les générations précédentes ne l’avaient fait dans une métaphysique brute de décoffrage. En vrac on conçoit bien que cela concerne aussi bien les nationalismes, les utopies matérialistes (ou autres) de la guerre ou de son aprés-guerre, que les flower children ou les sectes du New Age. Jamais le religieux d’une part et le sacré d’autre part n’ont été aussi prégnants*.
En quoi le religieux serait-il en train de revenir ?
L’islam « radical » donne du fil à retordre aussi bien aux économistes qu’aux brigades de sécurité ? Les autres intégrismes fascinent ou dérangent ? Les sociétés « secrètes » l’étant de moins en moins, elles font parler d’elles – paradoxe amusant ? Les sectes sont prêtes à s’enrichir sur le dos des gogos et pigeons divers ? Oui, certes. Rien de bien neuf dans tous ces aspects du religieux (même si, pour le coup, le sacré y perd un peu son âme).
Religieux qui n’en revient pas , religieux qui ne revient pas du tout car il n’est jamais parti. Il est le moteur imaginaire fondateur de l’idéal républicain le plus laïc, le plus strict, le plus vigoureux : déchoir, démériter dans ses fonctions républicaines équivaut toujours à commettre un péché, à s’exposer à être « dégradé ».
L’imaginaire, il est banal de le rappeler, est bien le même.
Mais alors, question : à qui cela profite-t-il de faire croire à ce « retour » d’un religieux que l’on serait soi-disant parvenu à tenir à distance comme on le faisait des loups jadis autour de la ville ? A qui cela profite-t-il ? Nul ne sait ou bien c’est une autre histoire sur laquelle il faudra nous bientôt revenir.
*A cet égard, on relira utilement, entre autres ouvrages sur le sujet : OTTO Rudolf, Le Sacré, Payot, 1949 – réed 2001